L’Art nouveau à Bruxelles selon Cécile Dubois
Vous me direz, à juste titre, que l’Année de l’Art nouveau est terminée et vous aurez raison. Mais cela signifie-t-il pour autant qu’il est désormais interdit d’évoquer en 2024 ce patrimoine si bruxellois ? Que nenni ! D’autant qu’en ce mois de janvier, il est encore permis de suggérer des cadeaux. Bref, je ne peux résister à l’envie de vous parler du superbe opus de Cécile Dubois L’Art nouveau à Bruxelles paru aux Editions Racine. Une façon inimitable pour tout un chacun de découvrir, par le texte et l’image, parmi les plus beaux trésors de la capitale…
Bruxelloise et licenciée en histoire, Cécile Dubois est connue de tous les amateurs de patrimoine dans notre région. Tout à la fois guide et conférencière, elle est spécialisée en architecture Art nouveau et Art déco. Sophie Voituron, qui vit et travaille à Bruxelles, est photographe plasticienne. Inspirée par les villes et l’architecture, elle a remporté de nombreux concours internationaux. Elles nous proposent le merveilleux catalogue d’une exposition imaginaire qui réunirait 36 des plus belles demeures intemporelles de l’Art nouveau à Bruxelles. Précisons que tous ces bâtiments existent encore et que beaucoup sont encore accessibles. N’entre donc pas dans cet ouvrage tout ce qui a été détruit et, notamment, la Maison du Peuple. Au-delà de sa valeur didactique et esthétique, ce livre est fort intéressant car il met en évidence toute la dimension humaine que ce patrimoine représente depuis que Victor Horta a créé en 1893 l’Hôtel Tassel, qu’il s’agisse des architectes, des décorateurs, des commanditaires, des propriétaires, des mécènes, des occupants…
Impossible évidemment de passer en revue les 36 immeubles. Limitons-nous donc à pointer 3 édifices qui sont autant de coups de cœur pour l’auteure, notamment parce que leur exploration lui a permis de faire de belles rencontres. Et commençons par l’Hôtel Otlet dû à cet architecte trop méconnu qu’est Octave Van Rysselberghe (qui collabora avec Henry van de Velde sur ce projet). C’est en 1894 que la maison de la Rue de Florence fut livrée à Paul Otlet, génial visionnaire qui fut parmi les premiers à vouloir réunir tous les savoirs du monde, bien avant Wikipedia. Si vous voulez visiter ce trésor de Bruxelles, il y a un truc : devenez client du grand avocat Alain Berenboom dont le cabinet occupe les lieux. Rappelons que ce grand spécialiste des droits d’auteur est lui-même un grand créateur puisqu’il gagna le Prix Rossel en 2013…
Puis, il y a la Maison Rosenboom, à la Rue Faider, qui a été créée par Albert Rosenboom (qui n’y a jamais habité). Cette bâtisse de charme nous offre aujourd’hui un récit passionnant dans le mesure où, depuis qu’elle a acquis en 2020 cette demeure classée, une famille s’attelle à la rénover. Le projet des nouveaux propriétaires, au terme des travaux, est d’habiter la maison tout en l’ouvrant partiellement au public, une évidence pour eux. Et pour nous…
Enfin, comment ne pas citer l’Hôtel Max Hallet qui est le seul hôtel particulier construit par Horta qui soit encore habité ? Autre particularité : il a gardé son affectation unifamiliale d’origine. L’heureux occupant n’est autre que Michel Gilbert, le « collectionneur des maisons Horta ». Il fait partie de ces passionnés qui ont été à l’origine de la sauvegarde de l’œuvre du maître. La capitale lui doit une fière chandelle. Comme nous devons une fière chandelle à Cécile Dubois pour avoir réussi cette magnifique synthèse de l’Art nouveau à Bruxelles…
Paul Grosjean
Chroniqueur/Patrimoine bruxellois
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