Il y a 175 ans était inaugurée la Galerie Bortier
Récemment, BX1 révélait que la Ville de Bruxelles, propriétaire de la Galerie Bortier, allait transformer ce passage historique en grand « food market », mettant ainsi en péril l’existence des bouquinistes qui s’y trouvent. Cette actualité me fournit l’occasion de rappeler l’histoire de cette pépite méconnue du patrimoine bruxellois…
En réalité, aujourd’hui, il n’y a plus que 4 passages historiques dans le paysage urbanistique de Bruxelles. Deux remontent au règne de Léopold Ier : ce sont les Galeries Royales Saint-Hubert, les plus anciennes et les plus prestigieuses, inaugurées en 1847 et c’est la Galerie Bortier, précisément, inaugurée il y a 175 ans en 1848. Ces deux réalisations s’inscrivaient dans le réaménagement du centre-ville lors de la première moitié du 19ème siècle. Les deux autres passages, datant du règne de Léopold II, correspondent aux grands travaux urbanistiques de la seconde moitié du 19ème siècle : c’est la Galerie du Commerce, dont il ne reste plus grand-chose, inaugurée en 1879 et c’est le Passage du Nord, sur la Place de Brouckère, inauguré en 1882. Ce qui est remarquable, c’est que les deux premières galeries, Saint-Hubert et Bortier, sont dues au même architecte, à savoir le génial Jean-Pierre Cluysenaar (1811-1880), à qui l’on doit aussi le Château Calmeyn à Drogenbos, le Château d’Argenteuil à Waterloo et le Conservatoire Royal de Musique à la Rue de la Régence…
Avec la Galerie Bortier, l’ambition de Jean-Pierre Cluysenaar était moindre qu’avec les Galeries Royales Saint-Hubert. Il s’agissait d’établir la liaison entre la Rue de la Madeleine et la nouvelle Rue Saint-Jean. En fait, le projet du promoteur, Pierre-Louis-Antoine Bortier, était d’envisager ce passage en complément de l’énorme complexe du Marché de la Madeleine, qui fut le premier véritable marché couvert de Bruxelles et qui était dédié aux marchands de légumes. Pour ce faire, l’architecte conçut un passage de style néo-Renaissance italienne, mêlant le fer et le verre. La façade principale, de style baroque, datait, quant à elle, de 1763. Elle était donc bien antérieure à la construction de la galerie. Cette façade fut conservée en 1958 lorsque le Marché de la Madeleine fut remplacé par la Salle de la Madeleine.
Ensuite, entre 1974 et 1977, la Galerie Bortier, qui était fort dégradée, fut rénovée par les architectes Mignot. Aujourd’hui, le passage, surtout connu pour ses bouquinistes, est devenu le rendez-vous des amateurs de livres anciens. S’il devenait un « food market », ce serait, en quelque sorte, un retour aux sources, au grand dam des amoureux de littérature. A la Ville de Bruxelles de trancher entre LE livre d’histoire et LA livre de tomate…
Paul Grosjean
Chroniqueur / Auteur / Narrateur
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