Avant Versailles, il y avait le Coudenberg…
Jusqu’au dimanche 2 mars 2025, l’asbl Palais de Charles Quint présente UNDER-GROUND, un parcours exceptionnel dans les vestiges souterrains du Palais du Coudenberg (à proximité de la Place Royale). C’est l’opportunité pour les visiteurs d’explorer les entrailles du pouvoir royal et c’est pour moi l’occasion de vous rappeler l’histoire de ce temple qui marqua les esprits à travers le monde pendant plusieurs siècles, particulièrement du temps de Charles Quint, avant que Louis XIV ne fasse de Versailles le centre de l’univers. Cette fabuleuse résidence princière disparut de la mémoire des Belges petit à petit à partir de la funeste nuit du 3 au 4 février 1731 lorsqu’elle fut dévastée par un incendie…
Selon les historiens, les origines du Palais du Coudenberg remontent au XIIe siècle. Mais c’est au XIIIe siècle que les Ducs de Brabant décidèrent de conférer à Bruxelles un rôle central dans leur politique expansionniste. C’est ainsi que ce château médiéval se mua tout à la fois en haut lieu de la diplomatie et de la culture. Sous les Ducs de Bourgogne, spécialement sous Philippe le Bon, la Ville de Bruxelles s’est ensuite attelée à attirer les plus riches princes entre ses murs d’enceinte. A cet effet, les édiles communaux se lancèrent dans l’édification, entre 1452 et 1460, d’une prestigieuse salle d’apparat, en l’occurrence l’Aula Magna. Par après, Charles Quint, l’empereur le plus puissant d’Occident, s’installa à Bruxelles dont il fit sa résidence principale. C’est d’ailleurs dans l’Aula Magna qu’il prit ses fonctions en 1515 et qu’il abdiqua en 1555. L’empereur espagnol veilla personnellement au développement du palais bruxellois durant la première moitié du XVIe siècle. Sous son règne, une imposante chapelle de style gothique fut notamment érigée. En réalité, cet ample complexe se transforma durant plusieurs siècles. Chaque souverain successif, qu’il fut brabançon, bourguignon, espagnol ou autrichien, entendait y marquer son empreinte en y déployant les plus belles œuvres des plus grands artistes : Titien (1488-1576), Brueghel l’Ancien (1525-1569), Rubens (1577-1640)…
Le 3 février 1731, à la suite d’une journée harassante, la gouvernante générale des Pays-Bas, Marie-Elisabeth d’Autriche, rejoignit ses appartements du Palais du Coudenberg. Prise par le sommeil, la sœur de l’empereur Charles VI négligea de faire éteindre les bougies et les braséros. Très rapidement, le feu se propagea aux panneaux de bois et aux pièces adjacentes. Au petit matin, la plus grande partie du bâtiment avait disparu dans les flammes. Après avoir abandonné les ruines palatiales à leur triste sort pendant quarante ans, les autorités locales décidèrent finalement de repenser l’ensemble du quartier de la Cour. Les restes du palais et ses environs furent rasés pour permettre la création de la Place Royale et la construction de nombreux immeubles néoclassiques (toujours en place aujourd’hui). Certains éléments anciens furent néanmoins conservés pour servir de caves et de fondations aux nouveaux immeubles. Ce sont ces vestiges qu’on peut aujourd’hui découvrir dans le site archéologique du Coudenberg. Comme quoi, de l’apparat à l’underground, il n’y a qu’un pas…
Paul Grosjean
Chroniqueur historique
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