Chronique n° 87 du 28 avril 2025

Retour d’Alexandre Dumas dans les Galeries Saint-Hubert

Du 30 avril au 25 mai 2025, le Théâtre Royal des Galeries propose dans son enceinte mythique de la Galerie du Roi, une nouvelle version de Kean. Cette pièce d’Alexandre Dumas, qui offre une réflexion unique sur la place du comédien dans la société, a toujours été incarnée par les plus grands acteurs. Elle fut créée en 1836 au Théâtre des Variétés à Paris par l’immense Frédérick Lemaître. Elle est portée ici par un casting « cinq étoiles » dont émerge Daniel Hanssens dans le rôle-titre. Cette superproduction de la Compagnie des Galeries, mise en scène par Alain Leempoel, me fournit l’occasion de rappeler qu’Alexandre Dumas fut un habitué des Galeries Royales Saint-Hubert. C’était il y a près de 175 ans…                                                                                                                                                                                 

Le 2 décembre 1851, le futur Napoléon III, alors Président de la République Française, s’octroya le pouvoir absolu au travers d’un coup d’Etat. C’est ainsi que les principaux leaders de l’opposition de l’époque furent frappés de proscription. Cela amena de nombreux proscrits à s’exiler vers Bruxelles, capitale d’un pays de liberté, ville de langue française située non loin de Paris. Parmi ceux-ci, le plus célèbre fut sans conteste Victor Hugo (1802-1885). Mais il n’y avait pas que l’auteur des Misérables à Bruxelles en 1851…

C’est le 10 décembre 1851, vers 23 heures, qu’Alexandre Dumas (1802-1870) prit le train à la Gare du Nord pour aller de Paris à Bruxelles. En réalité, profitant de l’agitation née du coup d’Etat, l’inventeur des Trois Mousquetaires voulait surtout fuir ses créanciers qui étaient nombreux. Arrivé dans la capitale belge, il s’adonna immédiatement à son sport favori, à savoir la rédaction de livres. Très vite, cet auteur de génie renfloua ses caisses. Il s’installa dès lors dans une maison, sise au numéro 73 du Boulevard de Waterloo, qu’il louait au banquier belge de Meeûs. Se sentant très rapidement à l’étroit, il s’accapara l’immeuble voisin. Sans demander l’autorisation, il abattit les cloisons entre les deux demeures pour en faire un seul hôtel de maître qu’il décora de façon ostentatoire. Certains auraient dit à la manière d’Edmond Dantès… En tout cas, l’endroit était idéal pour organiser des fêtes et recevoir des courtisanes. Au printemps 1853, Dumas organisa un banquet fastueux pour saluer ses amis belges avant de regagner Paris. Il quittait définitivement la ville où il avait entamé l’écriture de ses mémoires…

En fait, durant son séjour bruxellois, outre le Boulevard de Waterloo, Alexandre Dumas aimait arpenter les Galeries Saint-Hubert où il retrouvait ses compatriotes proscrits, dont son grand ami Victor Hugo. Son lieu de prédilection se situait peut-être au numéro 10 de la Galerie de la Reine, là où était né le Cercle Artistique et Littéraire, ancêtre de l’actuel Cercle Gaulois. Et il est fort probable qu’il fréquentait également le  Théâtre des Galeries ouvert cinq ans plus tôt. Finalement, ce Kean de la Compagnie des Galeries, c’est d’abord un retour aux sources…

Paul Grosjean

Chroniqueur historique

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